Aujourd’hui, je viens faire ma râleuse. Ma gueularde quoi ! J’ai beaucoup hésité à publier cet article. J’y ai renoncé à trois reprises. Mais il faut croire que la problématique des dozos me persécute, dans la mesure où je suis tout le temps rattrapée par cette actualité.
Il est déconcertant de constater qu’en Côte d’Ivoire, Il y a toujours des groupuscules qui cherchent à s’octroyer les pouvoirs régaliens de l’Etat.
Des coteries de pseudo justiciers, adeptes de la violence, en vertu de je ne sais quelle autorité, se muent du jour au lendemain, en garant de la justice, de la sécurité et du maintien de l’ordre public. Il ne reste plus qu’a s’octroyer la prérogative de voter nos lois, de gracier les prisonniers et le tour est joué !
De nombreux travers ont été décriés sous la présidence de Laurent Gbagbo. Allant de la dilapidation des deniers publics, à l’insécurité dont la forme la plus effroyable fut l’escadron de la mort. Une association particulière s’est illustrée sous le règne du Woody de Mama (l’autre nom du président Gbagbo) : la Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire (FESCI).
A l’ombre de la refondation
Sous la dynastie des refondateurs, nous avons souffert des dérives de cette fédération. Terreur, racket, agressions en tous genres et sous toutes les formes. Aussi bien envers les étudiants, les parents, que les professeurs. Ils ont même été accusés de meurtre ! Vrai ou faux ? Je ne saurais le dire…
A force de s’auto-bombarder général, caporal, sergent et j’en passe, ils ont fini par se prendre pour des corps habillés. Pas étonnant, que nombreux parmi eux pendant la crise postélectorale, se soient transformés en miliciens.
Lorsque rarement des jeunes agacés avaient le courage d’exprimer leur raz-le-bol, ils se faisaient tabasser, sous les regards intimidés des autres clients, qui se contentaient de murmurer des tsruuu, des yako et des : « Mon frère on est venu trouver ça comme ça. Faut laisser… Ils vont te tuer et puis ça va pas aller quelque part ».
L’impuissance du président face à cette gangrène était évidente. Pour cause ! Lorsqu’il fallait marcher pour empêcher le général Guéi de confisquer le pouvoir en 2000, la FESCI était de la partie. Quand il a fallu montrer l’attachement au président, pendant le coup d’Etat de 2002, la FESCI était au rendez-vous pour le soutenir. Quand on devait s’opposer aux soldats français, la FESCI s’était vaillamment illustrée. Auprès de qui avait-il la côte ? La FESCI… Même dans nos agoras ? Beaucoup de fescistes… Les miliciens pro-Gbagbo ? On compte bon nombre de Fescistes…
En toute honnêteté, s’il y a une organisation, dont je salue aujourd’hui la quasi-extinction, c’est bien celle-là.
Sous Alassane Ouattara (j’ai failli ajouter « Dramane » mais il parait qu’il n’aime pas trop… Normal, vu toutes les polémiques qu’il suscite à lui tout seul… Sacré prénom !), le grincement de dents ne s’est pas arrêté. Oh que non ! Il est bel et bien présent et très accentué dans le pays profond…
Ces dozos érigés en justiciers, à quand la fin ?
La présidence d’ADO, est très marquée par une nouvelle génération d’hommes forts, décidés à s’imposer dans le dispositif sécuritaire ivoirien. Ce sont les dozos, chasseurs traditionnels, qui ont délaissé la viande fraîche de la brousse, la venaison de nos forêts, pour chasser du gibier humain… Elle a bon goût la chair fraiche ?
Je ne m’attarderai pas sur les exactions par eux commises, parce que maintes fois relayées par l’Onuci et d’autres structures et organes de presses.
Si tous sont d’accord sur la nécessité de les faire retourner à leur activité d’antan, eux ne l’entendent pas de cette oreille. Il semblerait que ces derniers s’estiment incontournables dans le maintien de la sécurité. Et surtout insistent pour que le gouvernement use de tact envers eux.
Petite piqûre de rappel : le ministre délégué auprès du président de la République chargé de la Sécurité, Paul Koffi Koffi, était monté au créneau, suite à une série d’attaques perpétrées contre les FRCI, présumées en être les auteurs. Il n’y est pas allé de main morte avec ces chers dozos. Deux réactions très révélatrices s’en sont suivies.
Dans une interview accordée au quotidien L’inter le 25 septembre 2013, Lamoussa Diabaté de la Confrérie des dozos de Côte d’Ivoire (Codozci) affirmait « Je voudrais rappeler que le ministre est allé un peu trop vite en ce qui concerne un éventuel retour à la vie civile. Parce que des gens qui ont fait la guerre on ne les chasse pas comme ça. Surtout qu’il a reconnu lui-même notre importance pendant ces périodes de crise en Côte d’Ivoire…. Je pense que nous savons que nous sommes des chasseurs, mais il faut pouvoir les amadouer un peu, surtout que les dozos ont un statut (lequel ?). La question de sécurité n’est pas seulement théorique, mais pratique et même au-delà. Les dozos ont fait leur preuve dans ce sens ».
Le 16 octobre 2013, le quotidien Soir Info, relatait la descente meurtrière des mêmes dozos (qui demandent à être chéris), le 14 octobre 2013, dans le village de Gribouo, appartenant au département de Soubré en règlement d’un litige foncier. Bilan ? Quatre morts et trois blessés, tous d’une même famille.
Mais ce n’est pas le plus intéressant. Lamoussa Diabaté président des dozos de Toumodi, va déclarer ceci dans une interview accordée à en envoyé du journal le Nouveau Reveil en septembre 2013 : « Le gouvernement a donné son ordre, mais nous attendons l’ordre de Koné Zacharia. Si les patrons nous demandent de quitter le terrain, nous sommes prêts à quitter avant midi. Dans l’armée, c’est la discipline. Dans la confrérie des dozo aussi, c’est la discipline. Il n’y aura jamais de bras de fer entre les dozos et les forces de l’ordre, parce-que Koné Zacharia et Chérif Ousmane, eux-mêmes dozos, sont nos patrons et nous suivons leurs ordres. Chacun a un patron. On attend leurs ordres. S’ils disent que le gouvernement ne veut plus voir de dozo sur le terrain, c’est déjà fait. Même si je veux, et j’enlève mes habits, je les brûle… »
Eh beh dites donc ! Quelle déclaration ! Je comprends pourquoi les haussements de ton de notre président et les mises en garde de son ministre délégué peinent à être pris en considération !
Ils ne se reconnaissent pas en ces leaders. Ces dozos n’attendent que les instructions fermes de Koné Zacharias et Cherif Ousmane, ex-comzones, devenu respectivement depuis, commandant en second du bataillon d’artillerie sol-air (Basa) et commandant en second du groupe de sécurité de la présidence de la République (GSPR). Qu’attendent-ils pour leur demander de se déshabiller vite, vite comme on dit ici, pour rejoindre la vie civile ? Ils n’attendent que ça. Et… Nous aussi !
Ce n’est pas si simple…
Le gouvernement actuel pullule d’ex-comzones. J’imagine que chacun veut maintenir sa position et donc conserver un moyen de pression sur notre bien aimé président… Sans vouloir être impolie. Pendant ce temps, il y a des drames…
Toutes ces personnes « ont pris le soin d’assurer leurs arrières, en plaçant à leur suite des hommes fidèles qui ont repris la gestion de leur business » (Jeune Afrique N°2749 du 15 septembre 2013, repris ici).
Nous devons tirer les leçons du passé
La gestion des dozos est indiscutablement une épine dans les pieds du président Ouattara, comme les fescistes dans ceux de Laurent Gbagbo. Je dirai même que cette fois la situation est pire car nous parlons d’hommes qui fabriquent eux-mêmes leurs armes, et qui se plaisent de plus en plus dans leur nouvelle vie. Saura-t-il gérer cette situation ?
Lorsqu’on reproche une chose au gouvernement dans ce pays, après avoir « deviné » ton parti politique, on te lance l’ultime excuse : « Au temps de Gbagbo c’était pire, on vous a vu ici… Le pays avance! ». N’est-ce pas pour apporter une solution à cette mauvaise gouvernance, à ce laxisme que le président Ouattara a été élu ? L’histoire en principe ne devrait pas se répéter !
Dosso Sory président des confédérations Dozos de Côte d’Ivoire (Fenacodoci), déclarait récemment dans les colonnes du quotidien Soir Info, paru le 04 février 2014, que les dozos aspiraient eux aussi à l’émergence. Vous allez voir cela… Rassure-t-il.
Le ministre de l’Intérieur a quant à lui récemment affirmé qu’il prendrait des mesures pour régler la question. Nous regardons à lui, comme les yeux d’une servante espèrent en sa maîtresse…
Ceci dit, quand on a une dette envers les dozos, les FRCI, les ex-comezones, certains partis politiques, le dinosaure français etc. La question suivante se pose : peut-on convenablement diriger un pays lorsque l’on est redevable à tant de monde ?
Shalom ! Vive la Côte d’Ivoire, notre belle patrie !
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